Voici quelques échos de notre voyage-mission interculturel au Liban du 20 juillet au 10 août.
Nous étions un groupe de 16 étudiants, la plupart en Prépa à Sainte-Marie de Neuilly, accompagné par deux religieuses de la Communauté Saint-François-Xavier, Sr Agnès et Sr Sabine, auprès de 65 enfants libanais de l’école « Paradis d’Enfants » à Jounieh.
C'est grâce au Père Paul Rouhana, évêque de Sarba, qui a veillé sur nous tout au long de notre séjour, que nous avons découvert cette école. Elle fut fondée, il y a vingt ans, par la famille Frem (grande famille libanaise) pour des enfants défavorisés, offrant une structure privée et quasi gratuite. Les enfants de la colonie étaient sélectionnés par le service d’aide sociale sur plusieurs critères (cas sociaux, pauvreté, charges familiales lourdes etc.). Ce n’était donc pas toujours évident de travailler avec eux, certains étaient violents, d’autres insolents ou capricieux… Mais d’autres étaient de vraies merveilles aussi. Chaque enfant avait de belles qualités, parfois cachées derrière des réactions fortes, et au fil des jours nous les découvrions et les encouragions.
Pauline raconte : « Vendredi 20 juillet, 14h10. Nous voilà enfin sur le sol libanais après 5 mois d’attente. Notre excitation ne cesse d’augmenter à mesure que le petit bus à la sécurité douteuse nous rapproche de Jounieh, ville où nous nous apprêtons à passer les trois prochaines semaines. Un spectaculaire feu d’artifice tiré tout le long de la baie nous accueille : le voyage commence bien. Puis les jours se suivent et ne se ressemblent jamais : chaque jour c'est une nouvelle expérience qui commence. »
Nos matinées à l’école se déroulaient en trois temps :
- Tout d’abord nous commencions la journée par un temps de prière entre nous volontaires pour offrir au Seigneur notre journée et notre mission auprès des enfants, suivi d'une heure d’aide aux devoirs – le niveau est excellent ! Pierre témoigne : « Je m’occupais personnellement des CP, s’il n’était pas toujours facile de se faire obéir ou comprendre pédagogiquement à la vue de l’hétérogénéité du niveau et de l’attention des élèves, j’ai tout de suite été impressionné par la maitrise et la compréhension de la langue française par des enfants de 6 ans en moyenne. Ce moment était très particulier pour nous et permettait d’envisager une relation plus personnelle avec les enfants. L’aide aux devoirs permet en effet d’entrer en dialogue, de réfléchir ensemble, de montrer une affection et d’obtenir la confiance d’un enfant plus rapidement que s’il avait été dans un autre groupe. »
- Après une récréation bien méritée, de grands jeux collectifs étaient organisés : épervier, béret, chat perché. Puis un temps d’activité manuelle. Le but était que chaque jour, les enfants puissent repartir avec un objet fabriqué de leurs mains (pompons, origami etc.).
- Nous finissions la matinée par des ateliers pour préparer un spectacle qui a clôturé nos trois semaines : chant, danse, théâtre et décors. Ce dernier jour, certains parents ont pu se libérer pour assister au spectacle des enfants, c'était un moment très touchant. « Quel bonheur de voir la fierté dans tous les yeux des enfants lors de la représentation devant les parents ! Tous été très fiers de jouer ce qu’ils ont répété pendant plusieurs jours mais aussi de nous présenter individuellement à leurs parents. A nouveau ce fut un moment d’échanges très précieux dont je me souviendrai ! » (Pierre)
Grâce aux fonds récoltés pour notre projet (tombola, concert, dons…), nous avons pu venir en aide aux enfants qui ne pouvaient venir accompagnés, deux bus étaient affrétés chaque matin pour les conduire à la colonie. Nous avons aussi organisé deux sorties avec les enfants, une dans les ruines gréco-romaines de Faqra, et une autre sur le site phénicien de Byblos. Ce furent deux belles journées hors de la colonie pour ces enfants qui sortent peu de chez eux…
« Nous avons beaucoup reçu auprès des enfants, une découverte incarnée du Liban par le témoignage de l’histoire de chacun d’eux. Pleins de vie, ils nous ont appris à nous donner autrement que par les cogitations intellectuelles auxquelles nous sommes confrontés depuis le début de nos études. Résonnent en nous les prénoms de Maritta, Charbel, Jimmy, Matéo, Hassam... Reviennent en mémoire des matchs acharnés de foot à plus de 38° à l'ombre : nous étions tout de même les champions du monde !! » (Apolline)
« Ces enfants à la situation familiale pourtant très difficile ne cessent de nous surprendre, par leur gaieté et leur enthousiasme notamment ! Ils multiplient les câlins, nous proposent systématiquement de partager leur goûter, rient à gorge déployée… Nous tissons des liens que chaque nouvelle journée renforce un peu plus. Nous recevons encore plus que ne nous donnons tant ils sont riches d’enseignement. » (Pauline)
L’après-midi était consacré, après un temps de sieste bien mérité, aux visites culturelles et aux rencontres. Nous avons ainsi parcouru la quasi-totalité du pays !
Des étoiles dans les yeux, Pauline narre les lieux découverts : « Nous parcourons les plaines arides de la Bekaa en direction de Baalbek et de ses temples romains, les vestiges antiques de Tyr, les souks aux paniers débordants d’épices et d’herbes aromatiques de Saïda, les jolies ruelles fleuries de Zouk Mikael où nous rencontrons des étudiants locaux qui partagent leurs visions du monde et leurs aspirations... Nous découvrons le port de Jbail-Byblos, le palais de Beit-ed-Din tout de marbre et de bois sculptés, les rues agitées de Beyrouth et les forêts aux cèdres millénaires, symboles du Liban et ornant fièrement son drapeau. Le voyage fut également riche spirituellement grâce à la marche vers Harissa, haut lieu de pèlerinage – tant musulman que chrétien – d’où domine la Vierge du Liban, ou encore la marche dans la vallée sainte : la Quadisha – refuge historique de la communauté maronite ermite – jusqu’au monastère de Quannoubine où nous avons eu la chance de participer à une messe arabo-française et d’y passer la nuit. »
« J’étais heureuse, partage Apolline, coordinatrice du projet, que les volontaires puissent connaître le Liban avec ses multiples facettes, ce qui nous a permis de travailler avec les enfants en comprenant les situations, les vies pas toujours faciles, sans juger ni s’éprendre de pitié. Nous avons beaucoup discuté avec diverses personnalités impliquées au Liban (ancien ministre de l’intérieur, jeunes professionnels engagés, expatriés, évêque, maire, parents d’élèves, personnes de tous milieux, volontaires de l'Œuvre d'Orient, Emilie Philipps ancienne de la Prépa et volontaire civique internationale…).
Nous avons aussi beaucoup appris sur la vie en communauté à 18 : repas, vaisselles, partages, détentes, ménages, courses, pas tous les jours faciles ! » Ce que confirme Elise : « La vie en communauté n'est jamais simple, et nous en avons tous fait l'expérience. Il n'empêche que cette expérience a été pour moi une réelle prise de conscience, et un véritable moyen de grandir. »
« Ça a été pour moi une expérience incroyable, chaque jour a été riche en rencontres et je n'aurais jamais cru qu'en venant pour aider les enfants je recevrais autant. Je n'ai pas seulement de jolies photos, j'ai aussi un paquet de souvenirs ! » (Margaux)
Oui, l’émotion était à son comble au moment de « quitter ». Ce n’est pas un « A Dieu » mais un « Au revoir » que nous adressons à ces enfants, à nos amis libanais, à ce pays si accueillant et si riche en humanité. Yallah ce n'est que le début d'une aventure !
Propos recueillis par Sabine Algrin, sfx